Covid-19 : la méditation, un recours contre le stress


Changements de nos habitudes de vie et de travail, inquiétude pour notre santé et celle de nos proches, pour notre emploi ou notre activité, spéculation sur le monde d’après… La période troublée que nous traversons est source de stress et d’angoisse. C’est peut-être le moment de se mettre à la méditation, nous conseille Antoine Lutz, qui travaille sur les bases neurophysiologiques de cette pratique.

Le coronavirus provoque une crise sanitaire sans précédent dans nos sociétés. En plus des souffrances physiques et de l’angoisse provoquées par la maladie, le confinement et la crise économique et sociale qui en découle peuvent provoquer un stress intense et de la détresse pour nos proches et nous.

Depuis une vingtaine d’années, les pratiques de méditation sont utilisées dans le monde du soin de manière laïque pour la gestion du stress ainsi que comme approche complémentaire et intégrative de la santé. Leurs bienfaits cliniques sont particulièrement bien établis dans les troubles de l’humeur et de la douleur chronique. En plus d’agir sur le mental, la pratique de la méditation peut indirectement influencer notre santé, dans le sens où notre état psychique influence aussi le corps, en particulier le système immunitaire. Les mécanismes neurophysiologiques et neuro-psycho-immunologiques commencent à être explorés. L’utilisation de la méditation dans le soin et la société répond à un besoin croissant d’une médecine plus humaniste et préventive et d’une société moins en souffrance et plus fraternelle. Nous proposons cette approche notamment dans le cadre d’un diplôme universitaire pour les personnels soignants « Méditation et Pleine Conscience : Approche Intégrative en Santé» à l’Université de Lyon.

Cette crise sanitaire induit des changements brutaux dans nos habitudes et de l’incertitude face à l’éventualité d’événements indésirables.

Cette crise sanitaire, qui induit des changements brutaux dans nos habitudes et de l’incertitude face à l’éventualité d’événements indésirables, peut être source d’angoisse ou de mal-être pour nombre d’entre nous. Voici quelques exemples de changement dans notre quotidien qui se sont peut-être produits lors de cette crise :

  • diminution de l’activité physique due au confinement ;
  • maladie ;
  • perturbations des rythmes de travail, des activités sociales, familiales, scolaires, induisant une surcharge mentale (devoir travailler tout en gérant la garde des enfants, par exemple) ;

Dans la sphère du mental, ces événements augmentent l’incertitude, et donc le stress, dans nos vies. Par exemple, ils suscitent de l’inquiétude à propos :

  • de la maladie : vais-je être touché par le virus ?
  • de nos proches qui ont ou pourraient avoir le virus : va-t-il s’en sortir ? est-il bien soigné ? comment le soutenir à distance ?
  • de notre vie professionnelles : vais-je perdre mon emploi ou mon entreprise ?
  • de notre situation financière : comment payer mon loyer, mon emprunt ?

Au niveau psychologique, quels sont les mécanismes qui se mettent en place pour réagir face à ce stress ? Souvent, nos schémas habituels nous poussent à ignorer ou essayer d’éviter la souffrance. Nous y répondons alors de manière automatique, ce que parfois nous regrettons a posteriori. Par exemple :

  • irritabilité, agressivité, voire violence physique ou psychologique ;
  • ruminations, crises de panique ;
  • jugements excessifs contre soi-même ou contre les autres ;
  • fuite dans des comportements d’évitement (alcool, drogue, etc..)

Les pratiques de la méditation cultivent essentiellement la capacité à rester ouvert, ancré et sensible quand nous faisons face à la souffrance dans le monde pour y répondre avec plus de discernement et de bienveillance pour soi et les autres. Pour ce faire, ma méditation cultive en particulier trois capacités :

  • prendre conscience de ces changements et de nos réponses automatiques aux obstacles de la vie ;
  • lâcher prise, c’est-à-dire prendre conscience de la dimension illusoire de certaines réactions, pensées ou émotions du mental, qui risquent d’amplifier notre mal-être ;
  • cultiver des qualités mentales positives, c’est-à-dire qui développent résilience, tolérance et bienveillance vis-à-vis des obstacles et défis de la vie.

Cette crise ne serait-elle pas alors une opportunité d’explorer notre rapport à notre expérience, aux autres et au monde ?

Pour ressentir les bienfaits de la méditation sur le corps et l’esprit, il est nécessaire d’avoir une pratique régulière et soutenue. Cela peut prendre plusieurs semaines, voire des années, avant de constater un changement durable dans nos habitudes de vie. La méditation se pratique plus facilement en groupe et avec un enseignant. Ceci dit, lorsqu’on traverse des moments difficiles, l’esprit est plus enclin au changement. Cette crise ne serait-elle pas alors une opportunité d’explorer notre rapport à notre expérience, aux autres et au monde ? Et de nous relier à ce qui est essentiel dans nos vies ?

Dans ce contexte particulier, il est ainsi possible d’être inspiré et touché, même par de brèves sessions de méditation. C’est dans ce sens que Titi Tran, enseignante de méditation pour nos études, a accepté de proposer de courtes méditations pour les novices. Ces méditations ont été conçues selon une progression graduelle et se suivent dans un ordre précis. Elles ont été adaptées à partir d’un programme de méditation développé dans le cadre d’une étude scientifique en cours : Etude Silver Santé sur l’impact de la méditation sur le vieillissement, coordonnée par Gaëlle Chételat, à l’Inserm de Caen. Je la remercie du fond du cœur pour sa générosité. J’espère que ces méditations seront une source d’inspiration pour transformer les difficultés de cette crise sanitaire en opportunités pour se connaître et pour développer bienveillance et compassion, pour soi et pour les autres.

Prenez soin de vous, et bonne méditation !

(Article initialement publié sur le site i-Medit, reproduit avec l’aimable autorisation d’Antoine Lutz et l’Institut de recherche, de pratique et d’enseignement en méditation)

Titi Tran, instructrice de méditationMéditations guidées pour les novices

> Six brèves méditations guidées (7 minutes) pour s’initier à la pratique de la méditation sur le site i-Medit.
Par Titi Tran, enseignante en méditation dans l’étude européenne Silver Santé et dans le DU « Méditation et Pleine Conscience : Approche Intégrative en Santé » de l’Université de Lyon.

Chercheur(s)

Antoine Lutz

Chargé de recherche au Centre de recherche en neurosciences de Lyon (CRNL). Membre de l’équipe de recherche Dynamique cérébrale et cognition (Dycog). A travaillé dans le laboratoire dirigé par Richard Davidson à l’université du Wisconsin (Madison, Etats-Unis). Dirige le projet de recherche ERC Brain and Mindfulness, qui vise à étudier les processus expérientiels, cognitifs et neuronaux sous-tendant la pratique de la méditation de pleine conscience.

Voir sa page

Antoine Lutz

Laboratoire

Centre de recherche en neurosciences de Lyon (CRNL)

Le CNRL rassemble 14 équipes pluridisciplinaires appartenant à l’Inserm, au CNRS et à l’Université Lyon. Elles travaillent sur le substrat neuronal et moléculaire des fonctions cérébrales, des processus sensoriels et moteurs jusqu'à la cognition. L’objectif est de relier les différents niveaux de compréhension du cerveau et de renforcer les échanges entre avancées conceptuelles fondamentales et défis cliniques.

À lire également

Autres articles

Vascularisation du cerveau humain (©ESPCI Paris - PSL, Inserm, CNRS)
Les flux sanguins dans le cerveau comme on ne les avait jamais vus !

Ce que nous avons retenu de l’actualité des neurosciences de cette quinzaine dans les médias grand public.... Lire la suite...

Lire la suite ...
Semaine du Cervau
Semaine du Cerveau 2016 à Lyon : autour de la nutrition et des apprentissages

La 17e édition de la Semaine du Cerveau, coordonnée par la Société des neurosciences, aura lieu en France du 14 au 20 mars 2016. Pendant une semaine, le grand public pourra ...... Lire la suite...

Lire la suite ...
l'ocytocine, parfait philtre d'amour ? (©Shutterstock/ 4 PM production)
L’ocytocine, parfait philtre d’amour ?

Pour la Saint-Valentin, si l’on parlait un peu de l’ocytocine, parfois appelée « hormone de l’amour » ? En quoi inspire-t-elle le comportement des amoureux ? Voici ce qu’en dit la science.... Lire la suite...

Lire la suite ...