La revue de presse des neurosciences #17



Au programme de cette quinzaine : implantation de souvenirs pendant le sommeil, réparation du cortex par greffes de neurones et soigner les TOC grâce à la TMS.

Une équipe française parvient à implanter de faux souvenirs à des souris pendant leur sommeil

On savait depuis quelques mois qu’il était possible d’implanter de faux souvenirs grâce à l’optogénétique contrôle des neurones par la lumière contrôle des neurones par la lumière . Mais jusqu’ici l’opération avait toujours été effectuée lors d’une phase d’éveil (lire notre revue de presse du 31/08/2014). Récemment, une équipe de recherche française est parvenue à implanter de faux souvenirs de plaisir à des souris endormies. Ces résultats ont été publiés le 9 mars dernier dans le journal Nature Neuroscience.

Comment les scientifiques ont-ils procédé ?
Ils ont commencé par laisser cinq souris évoluer dans leurs cages pendant plusieurs jours et analysé l’activité de leurs « neurones de lieu », neurones qui s’activent en fonction du lieu où elles se trouvent. Après avoir obtenu ces données, ils ont attendu que les souris s’endorment. Sachant que, pendant la phase de sommeil, les souvenirs sont réactivés pour être renforcés, ils ont utilisé un programme informatique permettant de repérer les réactivations des différents neurones de lieu. Ils ont ensuite isolé un de ces neurones de lieu et, à chacune de ses réactivations, ils ont stimulé par optogénétique un faisceau de neurones impliqués dans le circuit de récompense permettant de ressentir la sensation de plaisir. Résultat : à leur réveil, les souris se sont précipitées dans le lieu associé à cette sensation de plaisir et y ont passé un long moment jusqu’à ce qu’elles comprennent que l’endroit ne contenait aucune récompense.

Pour Karim Benchenane, qui a dirigé les recherches, cela suggère que « le souvenir implanté peut être perçu consciemment par la souris, qui l’utilise dans un comportement dirigé vers un but », contrairement aux études précédentes qui « n’avaient créé que des réactions réflexes à un stimulus particulier ».

Pour en savoir plus :

Première mondiale : réparation du cortex cérébral par greffe de neurones

Le cortex cérébral est une des structures les plus complexes de notre cerveau. Il est composé d’une centaine de types de neurones organisés en six couches et en de nombreuses aires distinctes sur le plan neuroanatomique et fonctionnel. Il permet notamment de gérer les fonctions de la vision, de l’audition ou du mouvement. Lorsque le cortex est lésé à la suite d’un AVC ou d’une maladie neurodégénérative, cela peut entraîner des déficits fonctionnels importants.

Des chercheurs de l’université de Poitiers et de l’université de Bruxelles ont réussi pour la première fois à réparer les lésions du cortex visuel grâce à une greffe de neurones dérivés de cellules souches embryonnaires. Leurs résultats ont été publiés dans la revue Neuron au début du mois de mars. « Nous sommes les premiers à montrer que l’on peut réparer du cortex », explique Afsaneh Gaillard qui a dirigé cette étude. Dans une interview accordée au Figaro, la chercheuse raconte comment elle s’y est prise : « Le système était en place après un mois et demi, et des connexions se sont formées. Nous avons greffé des progéniteurs de neurones visuels, des cellules immatures qui, après la greffe, se sont encore développées, puis ont établi les bonnes connexions avec les bons neurones. En stimulant l’œil des souris, nous avons vu s’activer les neurones greffés.» Après douze mois, la greffe avait fonctionné chez 61% des animaux.

Cependant l’utilisation de cette technique chez l’homme n’est pas pour tout de suite. En effet, 6 greffons sur 47 contenaient une large proportion de cellules non neuronales, ce qui pourrait indiquer la formation d’un tératome, type de tumeur formée par des cellules non correctement différenciées. En outre, le cortex humain est beaucoup plus complexe que celui de la souris, comme le précise la chercheuse dans son interview : « Il est plus grand, donc les neurones greffés devront aller plus loin et projeter de plus grandes connexions axonales. »

Pour en savoir plus :

VIDEO

Soigner les TOC par la TMS

La TMS ou stimulation magnétique transcrânienne est une technique indolore de stimulation neuronale dans le cerveau. Répétée pendant plusieurs séances, cette thérapie ambitionne de traiter les personnes atteintes de troubles obsessionnels compulsifs (TOC), comme le montre ce reportage de l’émission Futuremag diffusée sur Arte.

EN BREF

  • Le stress favorise la dépression, et vice et versa. Si la cause du stress perdure, le corps réagit intensément. Après quelques semaines, un vrai risque de dépression apparaît chez les sujets les plus vulnérables. Article à lire sur le site Sciences et Avenir

  • Premier essai d’un drone piloté par la pensée. Tekever, la société portugaise qui coordonne cette expérimentation, se dit convaincue que cette technologie pourrait un jour être utilisée par des pilotes d’avions commerciaux. Article à lire sur le site Futura Sciences.

Chercheur(s)

Vincent Giudice

Docteur en biologie, spécialisé dans les cellules souches embryonnaires.

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Vincent Giudice

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